lundi 10 juin 2013

Imaginales 2013 : le match d'écriture de Présences d’Esprits

Ce genre de choses part toujours sur un coup de tête, un pari du genre : « Je suis sûr que tu n’en es pas capable » ou une invitation comme celle-ci : « Et si on y allait ensemble ? » lancée un soir au détour d’une conversation.
Et voici quelques apprentis auteurs réunis un vendredi après-midi à l’entrée de la médiathèque d’Épinal, à quelques minutes de marche du festival des Imaginales.

L’association Présences d’Esprits y organise un match d’écriture particulier : plusieurs équipes de trois personnes s’affrontent pendant une heure quarante-cinq à coup de… nouvelles. Il s’agit en effet de produire trois textes finis, sur trois thèmes différents répartis entre les membres de chaque groupe. Un jury et un vote public détermineront ensuite quel équipe remporte le match de l’année ! Mais, bien au-delà du classement, ce match constitue une rencontre entre des auteurs venus de tous les horizons, six d’entre eux étant également des professionnels invités par l’association (Pierre Stoltze, , Jean-Philippe Jaworski, Sylvie Denis, Chantal Robillard, Paul Beorn et Estelle Faye), et trois ayant gagné l’année précédente. Enfermés dans une petite salle avec leurs papiers et leurs ordinateurs, dix-huit amoureux de l’imaginaire ont produit dix-huit nouvelles dans une atmosphère d’émulation permanente : le travail habituellement de plusieurs heures réduit à son strict minimum, un premier jet brut de décoffrage, sans préparation, sans brouillon, soit le plaisir à l’état pur – enfin au moins pour l’auteur de cet article. 

L’équipe de Tintamare a donc décidé que ces matches constitueraient le dernier article de compte-rendu des Imaginales 2013.

Nous sommes d’abord allé demandé son retour d’expérience à Estelle Faye* :

Q – Quand est-ce que Présences d’Esprits t'a contactée pour participer aux matches ?

R – Présences d’Esprits m'a contactée quelques jours seulement avant le festival, ils avaient eu des désistements d'auteurs suite à l'organisation des tables-rondes.
De mon côté, je n'avais pas de conférence à ce moment là, et j'aime bien les nouvelles expériences, donc j'ai dit oui tout de suite.

Q – Connaissais-tu déjà le concept ?

R – Je ne connaissais absolument rien au concept, je savais juste qu'il s'agissait d'écrire de la nouvelle - et ce n'est pas la forme dans laquelle je me sens la plus à l'aise.
Mais je me suis dit que ce serait l'occasion de découvrir.

Q – Comment as-tu vécu cette "compétition" amicale avec des auteurs amateurs et professionnels ?

R – C'était un moment très sympathique, il y avait une vraie bonne ambiance. Dès l'annonce des sujets, il n'y avait plus que des auteurs dans la salle, des gens qui aiment écrire, sans distinction de statut. Les claviers crépitaient, on sentait plein de petits univers qui se créaient derrière les écrans d'ordinateur...
Au fond, j'ai trouvé ce match d'écriture à l'image des Imaginales : un festival où avant d'être auteurs pros, amateurs, ou simples lecteurs, nous sommes tous des fans des littératures de l'Imaginaire.

Sur cette conclusion approuvée, nous nous sommes tournés vers Pascal Bleval**, alias Scalp, participant « amateur » :


Q – Qu'est-ce qui t'a décidé de t'inscrire aux matchs ?

R – Un coup de tête et une méprise.
Un coup de tête après avoir lu l'info sur le forum Cocyclics. Je me suis dit "pourquoi pas!"
Une méprise parce qu'au début, j'avais juste envoyé un mail à l'organisatrice pour lui demander plus de détails, et qu'elle en a déduit que je voulais m'inscrire. Je ne l'ai pas détrompé, et c'était parti.

Q – T'y es-tu préparé ? Après tout, 1h45 d'écriture non-stop pour écrire une nouvelle en entier, c'est court !

R – Je me suis préparé à fond ! J'ai rédigé 7 ou 8 textes dans les 3 semaines qui ont précédé. J'ai notamment "traité" les sujets de l'an passé. Par chance, j'avais réussi à ne pas les lire avant, ce qui fait que j'étais vraiment "dans les conditions" du match, ou presque.
Par contre, ça m'a surtout servi à savoir de combien de temps je disposais pour penser à un synopsis, rédiger le 1er jet et faire mes corrections.
Les thèmes étant différents à chaque fois, ce n'est pas parce qu'on réussi à en traiter 1 qu'on réussira à traiter le suivant, donc mon entraînement a surtout eu une utilité au niveau de la gestion du temps. Ce qui est déjà pas mal, ceci dit.

Q – Comment as-tu vécu ce moment un peu spécial ?

R – J'ai trouvé ça très sympa d'écrire au milieu de tout ce beau monde, entre les membres de CoCyclics et les auteurs pro. J'ai adoré. C'était stressant, par contre, mais il est vrai que je stresse facilement, parfois.

Q – Qu'en as-tu retiré ?

R – Une énorme envie de recommencer !

Nous ne pouvons qu’approuver cette dernière phrase.  Et c’est tout naturellement que nous allons voir Magali, représentante de Présences d’Esprits lors des matches (et distributrice de chocolats pendants l’épreuve) :

Q – Comment vous est venue l'idée des matches d'écriture ?

R – J'ai imaginé les matchs avec un autre membre de Présences d'Esprits, qui refuse d'être mentionné et que nous appellerons donc Le Chambellan.
Il y a eu une conjonction de plusieurs choses:
- Le Chambellan et moi trouvions qu'AOC, le fanzine du club Présences d'Esprits plus spécialisé dans la nouvelle, ne recevait pas beaucoup de (bons) textes courts. Or, nous faisons tous deux partie du comité de lecture.
- Plusieurs des auteurs qui animent les ateliers d'écriture du club nous avaient proposé des exercices avec des éléments piochés au hasard. Je suis de ceux qui trouvent que la contrainte donne des idées.
Temps limité + contrainte, donc. Quant à la notion de "match", c'était une façon d'ajouter une dimension ludique et une pointe d'émulation à la chose. Elle vient des matchs d'impro au théâtre, et/ou des jeux de société.
A partir de là, on a affiné et on a testé plusieurs formules, temps, nombre de joueurs par équipe...

Q – Depuis combien de temps en organisez-vous aux Imaginales ?

R – C'était la deuxième fois en 2013, alors que les matches du club existent depuis 2009, même si c'est de façon irrégulière.
La particularité des matchs aux Imaginales, c'est la combinaison auteurs "pros" et auteurs "amateurs"; comme pour nos matchs informels, c'est l'aspect ludique et convivial qui nous intéresse surtout, mais aussi l'occasion de se rencontrer, de se parler, assis à la même table, en égaux.
Les délais à Épinal ne permettent évidemment pas de faire le match en deux mi-temps comme nous le faisons en week-end (un texte le matin, un l'après midi, le Chambellan Arbitre préparant le déjeuner pendant ce temps).

Q – Pas trop compliqué, d'organiser tout cela ? (choix des sujets, contacts avec les auteurs pro, préparation du jury, etc)

R – Il y a trois "parties" à l'organisation des matchs - d'égale importance :

1. La préparation pratique (sujets, thèmes, affichettes, appels aux volontaires pour le jury). Ça a été assez long la première année, mais nous avions déjà réfléchi à des thèmes et des sujets puisque nous en "usons" depuis 2009, et une des forces d'une association comme le Club, c'est qu'il y a un certain nombre de bonnes volontés - assez pour monter un jury.
Notons d'ailleurs que tout le monde peut proposer un thème ou une contrainte – Le Chambellan fera une pré-sélection, et on validera en comité.
Comme l'activité est assez nouvelle, nous avons encore des tas de petites choses à améliorer, bien sûr.

2. Le contact avec les auteurs pros. ça prend un certain temps, d'abord parce que ce n'est pas très simple à expliquer, ensuite parce que je ne suis pas naturellement encline à aller vers les gens que je ne connais pas; je me force.
Tout le monde n'est évidemment pas partant pour un match - c'est un exercice qui n'enthousiasme pas tout le monde. Mais je n'ai rencontré à peu près que des refus gentils, et j'espère que les auteurs qui ont accepté se sont beaucoup amusés.

3. L'organisation sur place. C'est ce qui est le plus long, et qui monopolise le plus d'énergie, forcément. Ce chapitre là se passe de détails (c'est un peu comme la température de cuisson des cookies, ça intéresse moins que leur goût), mais il ne se passe pas de remerciements: au staff des Imaginales (Marion Bailly, Séverine Garnier, Karine, dont le nom de famille m'échappe, et tous les autres, pour leur aide dans tous les petits détails et leur disponibilité malgré le stress); à la BMI (salle, papier, imprimantes, nourritures et boissons roboratives); et à Damien Didier-Laurent (de la BMI), pour son aide plus que précieuse - sans lui, j'y serais encore.
Et bien sûr, merci aux membres du club qui participent, en particulier le jury
Q – Qu'en retirez-vous chaque année ?

R – Le match fait partie d'un partenariat entre le club Présences d'Esprits, la BMI et les Imaginales. Le Club en retire des conditions privilégiées pour sa présence au festival, et une certaine visibilité.
Et aussi, ça m'amuse beaucoup de m'occuper de ça - faute de pouvoir faire partie des candidats.

Et c’est ici que Magali a sorti la question que nous n’attendions pas :

À mon tour de poser une question: envie de rejouer ?

Ce sont les trois gagnantes du match de cette année qui s’y collent : Ioana Alexandru, Célia Deiana et Anne Rossi. Alors les filles, qu’en dites-vous ?

Célia Deiana : Oui ! Un grand oui pour ma part ! J'aime de facto travailler sous contrainte (de thème et de temps) Je suis déjà une adepte des words wars et des Nuits de l'Ecriture (quand j'arrive à rester réveillée). Le concept des matches m'a donc beaucoup plus. J'ai également aimé partager les 8/10 premières minutes du matches avec mes coéquipières: nous avons pu discuter de nos idées ou bouts d'idées avant même de commencer, et c'est quelque chose que j'ai adoré faire aussi. Donc pour moi, ce fut une excellente expérience (même s'il manquait peut-être un peu de climatisation dans la salle).

Ioana Alexandru : Un grand oui pour moi aussi ! Même si je n'aime pas plus que ça l'idée de contrainte thématique, le fait de participer à ce match en équipe, avec deux personnes que je connais et que j'apprécie a été très stimulant et amusant. Connaissant les goûts des unes et des autres, nous avons su profiter pleinement des 8/10 minutes de réflexion de groupe pour échanger autour de nos idées, en piocher deux ou trois chez la voisine, et partir sereine dans l'écriture de la nouvelle. L'ambiance dans la salle, entre émulation et écriture avait quelque chose de grisant que j'espère retrouver l'année prochaine.

Anne Rossi : Oui ! Je n'avais jamais écrit dans une salle remplie d'auteurs au travail, c'est impressionnant. Puis l'ambiance est très sympathique (petit détail parmi d'autres: les noms des équipes - pour la prochaine fois, je peux être une pirate?) Le brainstorming obligatoire en début de partie est très stimulant, aussi. J'ai trouvé très sympathique d'avoir accès aux textes des autres auteurs, pour voir la façon dont chacun s'était approprié le thème: tout les interprétations sont possibles! Et dans l'ensemble, j'ai trouvé les résultats impressionnants.

Note : les textes des gagnants des matchs d'écriture sont publiés dans le fanzine AOC (Aventures Oniriques et Compagnie). Voici le numéro où sont publiés les textes des gagnants de l'année passée : http://www.presences-d-esprits.com/boutik/product_info.php?cPath=22&products_id=134

Pour retrouver les activités et publications de Présences d'Esprit, rendez-vous sur leur site :  http://cms.presences-d-esprits.com/

* Estelle est l'auteur de Porcelaine, paru aux éditions "Les moutons électriques" et de "La dernière lame" paru chez les éditions "Le pré au clerc".

** Pascal Belval a un blog intitulé "L'auberge des terres Sombres". 

Merci à Célia Deiana pour la rédaction de cet article et à tous les intervenants pour les belles réponses à nos questions !

2 commentaires :

  1. Bravo pour cet article ! Magali du Club Présences d'Esprits porte cette manifestation et c'est une belle réussite et un beau partenariat.
    Merci de faire honneur à cette activité du club
    Marie Hélène Hochet

    RépondreSupprimer
  2. C'est gentil ce petit Avis sur les matchs. J'ai été membre du jury cette année et j'ai été ravi de vous lire!

    Olivier

    RépondreSupprimer