mercredi 2 octobre 2013

Interview croisée avec Estelle Faye et Xavier Mauméjean

Dans l'idée de vous proposer des échanges autour de la publication d'un premier roman et de la relation entre un éditeur/une éditrice et un ou une "jeune" auteur-e, l'équipe tintamar(r)e a le grand plaisir de vous offrir aujourd'hui une interview croisée avec Estelle Faye et Xavier Mauméjean. 

On en profite pour féliciter Estelle pour le prix Elbakin qu'elle a reçu pour son roman "Porcelaine" ! 

Pour commencer cet entretien, pourriez-vous présenter en quelques mots vous et la collection que vous dirigez ?
 
Xavier Mauméjean : Pandore est une collection de fantasy à destination d’un lectorat Young Adult. Elle explore tous les types de fantasy, aussi bien les classiques comme la Sword Fantasy, que les tendances plus actuelles, telles la Steam Fantasy, l’Urban et la Science Fantasy. Enfin, élément primordial qui fait l’identité de la collection, elle n’accueille que des écrivains d’expression francophone. 

Estelle, quelques lignes pour vous présenter ? 

Estelle Faye : Je viens du théâtre, j'ai été comédienne, metteur en scène, j'ai dirigé ma propre troupe. En parallèle, j'ai poursuivi des études de lettres à la Sorbonne, j'ai fait une maîtrise et un DEA en rédigeant des mémoires sur la fantasy française. Puis je suis passée par une école de cinéma, et depuis j'essaye de faire mon trou comme scénariste et réalisatrice.
Mes deux premiers romans, "La Dernière Lame" et "Porcelaine" sont parus il y a quelques mois, le premier au Pré aux Clercs et le deuxième aux Moutons Electriques. Actuellement, je travaille sur les suivants.


Estelle vient de gagner le prix Elbakin pour son roman "Porcelaine", paru aux Moutons Electriques et Marie Pavlenko a reçu le prix Elbakin Jeunesse pour son roman "La fille Sortilège" qui est sorti dans votre collection. Une belle reconnaissance pour des auteurs que vous suivez de près. Quel est votre sentiment par rapport à ces prix ?

Xavier Mauméjean : C’est une question importante à laquelle je répondrais en deux points.
D’une part je suis ravi pour Marie et Estelle qui sont des auteurs que j’estime, des écrivains d’importance avec lesquelles j’ai l’honneur et la joie de travailler, à commencer d’ailleurs par les deux titres primés. J’étais déjà ravi qu’Hervé Jubert remporte le grand prix de l’Imaginaire avec « Magies secrètes », l’un des premiers titres de notre collection. 

D’autre part j’estime que les prix ont leur importance, notamment pour des auteurs commençants, ce qui est un peu le cas pour Marie, bien qu’elle ait très vite imposé sa plume, et assurément pour Estelle qui s’est elle-aussi fait remarquer d’entrée avec ses deux premiers romans, « Porcelaine » mais aussi « La dernière lame » dans la collection Pandore. 

Dans l’un et l’autre cas elles ont écrit des romans assurément personnels, sans concession d’aucune sorte, et le prix vient comme une reconnaissance. J’en profite pour saluer Elbakin, et auparavant le Grand Prix de l’Imaginaire, d’avoir mis à l’honneur une fantasy exigeante, qui plus est d’expression française ce qui est plus difficile à imposer en librairie que des titres anglo-saxons. Il fallait le dire, voilà qui est fait.
Estelle, est-ce que votre parcours dans le monde du théâtre, de la télévision et du cinéma a influencé votre façon d’écrire ? Si oui, de quelle manière ?

Estelle Faye : On me dit souvent que j'ai un style très visuel, ça vient sûrement de là.
Le théâtre m'a aussi appris l'importance des personnages dans une histoire.
Très souvent, je construis mes personnages comme si j'allais les jouer. J'essaye de ne pas avoir d'idées préconçues sur eux. Je me demande toujours comment, vu leur parcours, leur personnalité, ils vont réagir dans une situation donnée. Si cela me pousse à changer la suite de mon histoire, tant mieux.  

Xavier, connaissiez-vous Estelle avant de lire son manuscrit ? Par quel biais l’avez-vous découverte ? Connaissiez-vous son travail d’actrice ou de réalisatrice ?

Xavier Mauméjean : J’ai découvert Estelle Faye par son texte publié dans l’anthologie « Dragons » parue chez Calmann-Lévy il y a quelques années sous la direction de Sébastien Guillot. Sébastien m’avait fait part de son enthousiasme à l’égard d’Estelle, alors auteur débutant, enthousiasme partagé aussitôt. J’ai donc contacté Estelle afin de travailler ensemble. J’ai très vite ressenti de l’estime et de l’affection pour cette personne remarquable, et me suis donc en effet intéressé rapidement à ses autres talents. Une Diane qui compte bien des cordes à son arc…

Comment s’est passé le travail sur le texte avec Estelle Faye ? L’avez-vous abordé de la même façon qu’un de vos autres auteurs maison ?

Xavier Mauméjean : Estelle m’a proposé un synopsis et un essai d’écriture que j’ai validés, ce que je fais pour tous les auteurs qui souhaitent écrire pour Pandore. Puis elle a rédigé son roman sans que j’intervienne durant le processus d’écriture. Après quoi, j’ai proposé certaines corrections ou suggestions, en accompagnant le texte mais sans jamais rien imposer. Autrement dit, j’ai effectivement procédé comme avec les autres auteurs, ce qui est chose aisée dès lorsque l’on a affaire d’entrée à un authentique écrivain. Estelle Faye a le talent, condition fondamentale, peut-être lui ai-je indiqué des pratiques de métier. On ne cesse d’apprendre, et là je vous réponds en tant qu’écrivain.

 Estelle, comment vous est venue l’idée de créer un monde dans lequel les océans montent inexorablement ?


Estelle Faye : Je crois que j'étais en manque d'océans ! Quand j'ai imaginé le monde de "La Dernière Lame",  je n'avais quasiment pas quitté Paris depuis près d'un an. J'avais désespérément envie d'eau salée, de grand large, de vent chargé d'embruns... Même la vase du littoral me manquait. 

Est-ce que « La Dernière Lame » est le premier roman que vous avez écrit ?

Estelle faye : en fait, "La Dernière Lame " est le deuxième roman que j'ai écrit.
Le premier était "Porcelaine", les hasards de l'édition l'ont fait paraître deux mois après. 

Avez-vous fait appel à des amis, des proches, des bêta-lecteurs, avant l'envoi du manuscrit?

Estelle Faye : Je discute beaucoup avec mes bêta-lecteurs. Ils sont présents dès l'étape du synopsis. Ils m'aident à corriger mes textes et aussi à aller plus loin, à développer le vrai potentiel de mes histoires. Et ils me connaissent depuis assez longtemps, pour ne plus prendre de gants avec moi, c'est précieux !
 

Xavier, quelle stratégie marketing avez-vous mis en place pour faire connaître ce roman ? Est-ce la même pour tous vos auteurs ?

Xavier Mauméjean : Exactement la même que pour les autres auteurs, sachant de plus que l’équipe du Pré aux clercs, et je pense plus particulièrement aux éditrices Carola Strang et Isabelle Lerein, n’ont pas hésité à compter un écrivain débutant parmi les titres de lancement de la collection. Le service de presse, la couverture médiatique, aussi bien en presse traditionnelle que sur le Net (qui devient un partenaire absolument incontournable via notamment les blogs), ont été conduits de la même façon pour tous les auteurs de Pandore.

De quelle manière s’est déroulée votre rencontre avec l’auteur ?

Xavier Mauméjean : J’ai d’abord rencontré l’auteur via son texte, ce qui est le principal. Puis la personne, dans les deux cas un enchantement, assurément une rencontre qui marque une carrière de directeur de collection.

Estelle, de quelle manière s’est déroulée votre rencontre avec Xavier ?

Alors que je terminais mon école de cinéma, une amie m'a envoyé un lien vers un Appel à Textes, pour l'anthologie "Dragons" chez Calmann-Lévy. J'ai écrit une nouvelle juste avant la deadline, en écoutant en boucle le "Rocky Horror Picture Show"'. Et j'ai été retenue pour l'antho.

Quelques mois plus tard, au Festival des Imaginales, j'ai appris via un libraire sympathique que Xavier Mauméjean avait lu mon texte, qu'il l'avait apprécié. Sur le moment, je n'ai pas su où me mettre. Et puis j'ai rencontré Xavier, nous avons commencé à parler d'un roman, de ce qui allait devenir, plus tard, "Porcelaine".

Ensuite Xavier a créé la collection Pandore avec le Pré aux Clercs, et il a pensé à moi pour y participer. Nous avons discuté de fantasy, de voyages…
Je lui ai envoyé un premier synopsis de "La Dernière Lame".  A l'époque, c'était Joad, le médecin altruiste, qui se trouvait au centre de l'histoire. Xavier m'a suggéré de mettre plutôt au premier plan Marie, l'anti-héroïne, la guerrière fanatique qui veut détruire le monde. J'ai suivi son conseil, et tout est devenu plus clair, la structure du roman, ses lignes de forces, son identité même. 


Auriez-vous des suggestions, des conseils à donner aux auteurs qui désirent soumettre leurs textes ?

Estelle Faye : Lisez, lisez beaucoup, et notamment des auteurs français. Ça vous aidera à vous situer dans le paysage littéraire, à découvrir quel auteur vous voulez être, vers quels éditeurs vous voulez aller.
Allez en festival, en dédicace, en librairie, dès que vous le pouvez. Parlez à des libraires, des éditeurs, des auteurs, des lecteurs... Écrivez ce qui vous passionne, tentez les AT qui vous font envie.... On ne peut pas savoir à l'avance ce qui déclenchera une publication, quelle rencontre changera votre vie d'écrivain.


Xavier, auriez-vous, vous aussi, des conseils à donner aux auteurs qui désirent soumettre leurs textes ?

Xavier Mauméjean : Oui, des conseils très concrets et qui sont de bon sens. D’écrire que si c’est nécessaire, pas pour avoir son nom imprimé sur une couverture. D’écrire parce qu’on ne peut pas faire autrement. De se demander, avant d’envoyer le texte, si c’est ce que l’on pouvait faire de mieux à ce moment-là. D’estimer, donc, que c’est ce que l’on pouvait produire de plus abouti. De s’informer sur l’éditeur avant d’envoyer un texte qui n’entre pas dans ses lignes de publication. D'être patient et, en attendant les réponses, de se remettre à l’ouvrage pour écrire.

 Pour aller plus loin : 





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Merci à Mandragore pour les questions judicieuses !


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